8.4.06

"Très" sages femmes
(Article pour le compte du FNUAP (c) )
C’est l’histoire de jeunes citadines qui ont choisi de travailler à la campagne. Leur profession : sages femmes. Leur mission : sauver des vies. Nous avons rencontré l’une d’elles. Sofia nous parle de la difficulté de son métier, mais aussi de la joie de donner la vie.
Un peu timide, voilée mais communicative et enjoué, Sofia Tamalout exerce le métier de sage femme au centre de santé de Sahrij. Elle est là depuis deux ans. Elle partage cette responsabilité avec une autre sage femme et une infirmière polyvalente venue dernièrement. Sofia nous confie, non sans fierté, avoir aidé près de 300 femmes à accoucher. Un métier difficile selon elle, qui exige une grande disponibilité et un sens aigu de la communication. D’ailleurs son travail ne lui laisse aucun répit, durant les semaines de garde, elle est obligée d’être à la disponibilité du centre 24h/24.Accoucheuse en sérieElle nous raconte son premier jour dans le centre de santé : «la première chose qui m’effrayait, c’était l’énorme responsabilité dont je suis investie. Je n’étais plus étudiante, mes actes avaient des conséquences directes sur les patientes, l’erreur n’était plus tolérable ». D’ailleurs, dès son arrivée, elle a du faire un premier accouchement. «Heureusement, tout s’était bien passé. J’étais soulagée et contente d’y être parvenue seule ». Sofia avoue être chanceuse à plus d’un niveau, elle est soutenue par toute l’équipe, et surtout par le major de la circonscription, Miloudi Hamdouchi. Selon elle, c’est grâce à la grande souplesse de travail qu’elle et ses collègues arrivent à accomplir leur mission. Un exemple pour illustrer ces propos. Le jour même de notre visite, la seconde sage femme du centre était absente à cause du décès de son père. Selon la loi, elle n’a droit qu’a 3 jours de congé, mais le major va lui en octroyer plus. Miloudi nous explique pourquoi : «Notre objectif, c’est que le travail soit accomplie correctement, or cette jeune femme ne pourra jamais supporter la pression car elle est encore sous le choc. Il est hors de question de la faire travailler au risque de mettre en danger la vie des femmes enceintes ». Sofia bénéficie aussi d’un autre avantage. L’endroit dans lequel elle travaille est plutôt accessible par les transports, ce qui n’est pas le cas de tous les centres ou travaillent les sages femmes. L’une de ses amies, par exemple, travaille dans un douar. A chaque fois qu’elle désire ce rendre chez ses parents à Marrakech, c’est l’expédition. Elle doit traverser plusieurs kilomètres de piste avant de trouver un taxi qui veuille bien l’emmener.Une intégration difficileSofia a réussi à s’intégrer en campagne, mais ça n’a pas toujours été le cas. La première difficulté à laquelle elle a du faire face, c’est les divergences de mentalités. «Le taux d’analphabétisme est très élevé ici. Même si en ville il y a des femmes analphabètes, leur environnement les aide à prendre conscience de beaucoup de choses » dit avec dépit Sofia. Les femmes rurales ont aussi des réflexes différents des citadines, elles ne s’adressent au centre d’accouchement que quand leur grossesse présente des complications. « En compagne, les femmes sont très récalcitrantes aux conseils médicaux. Il arrive que les conseils que je leur donne ne soient pas pris en compte à cause d’une femme du village qui leur a dit le contraire » renchérit Sofia. Mais la confiance se gagne, et les femmes finissent par lui accorder la leur. La preuve, le taux de femmes qui ont recours au centre augmente. «Au début, elles n’étaient qu’une vingtaine à arriver chaque mois, maintenant, leur nombre dépasse les 40» explique Sofia, registre du centre à l’appui. Mais cela pose un autre problème, le nombre réduit du personnel et le matériel insuffisant. En effet, les deux sages femmes, l’infirmière et la seule ambulance qui équipe la circonscription paraissent bien chétifs comparés au nombre de patientes qui attendent dans les deux salles d’attente. De plus, le matériel disponible est loin de répondre aux attentes de la population. «On ne possède pas le matériel pour la réanimation des nouveaux nés, pas de table chauffante non plus ni de ventouse ou de bouteille d’oxygène» avoue Sofia. Elle essaie donc de repérer au maximum les complications avant l’accouchement. Pour l’instant, ses efforts ont l’air de porter ses fruits, aucun décès maternel n’a été enregistré depuis la création du centre.
ZC

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