14.4.06

Bibliothèque nationale:des livres et des maux
(Article publié dans TelQuel n°220)

Carence flagrante en documents et pagaille ambiante : c'est le triste lot de la Bibliothèque nationale, qui attend son déménagement dans des locaux plus adaptés. Reportage.

Quelque 350 000 ouvrages, 200 000 périodiques, en plus des manuscrits et des livres rares… Si la Bibliothèque nationale n'ose concurrencer les plus grandes bibliothèques, elle a au départ un nombre honorable de documents. Pourtant il y a un hic : en chercher un équivaut à chercher une épingle dans une meule de foin. Nombre limité d'ouvrages, des livres la plupart du temps, déclassés, un fichier informatique pas très précis… Malgré tout, la bibliothèque ne désemplit pas, une vingtaine de visiteurs sont attablés dans chaque salle. Dans la masse des usagers, un visage atypique, Kjartan, un étudiant danois qui prépare sa thèse au Maroc. Il vient souvent à la Bibliothèque nationale, mais pas pour chercher des livres : “Je viens pour l'ambiance studieuse qui m'aide à travailler sur mon ordinateur. Quand je veux un document, je vais plutôt au centre Jacques Berque”, nous confie-t-il. De son côté, le directeur, Driss Khrouz, conscient du manque à combler, nous assure : “En 2006, nous avons renouvelé l'abonnement aux revues, suspendu depuis les années 80 et nous nous sommes abonnés aux revues électroniques. Pour les livres spécialisés, nous ne pouvons pas tout avoir. C'est le rôle des bibliothèques universitaires. Nous avons toutefois commandé les références les plus importantes”. En attendant, chaque visiteur a son urgence. Anass prépare un doctorat en droit privé. Il estime qu'il n'y a pas assez d'ouvrages spécialisés. “Beaucoup de livres sont disponibles en librairie mais pas ici. C'est gênant, surtout lorsqu'il s'agit de livres de référence”. Bouchra prépare sa thèse. “Je me déplace à plusieurs reprises à Casa à la fondation Al Saoud pour chercher des documents. Ici, il n'y a que des ouvrages anciens”. Mustapha Kadiri, administrateur, explique : “On remplit le rôle des salles de lecture des facultés. Les étudiants viennent ici car ils n'ont nulle part ailleurs où travailler”.
Une simple salle de lecture
Quand les visiteurs se donnent la peine de chercher des livres, ils doivent composer avec les problèmes d'organisation de la bibliothèque. Première gageure : faire des allers-retours entre deux bâtiments pour pouvoir consulter le fichier informatique. Pas plus tard que l'année dernière, on pouvait faire ses recherches sur place. Mustapha Kadiri explique que c'est pour dégager les couloirs de la salle, encombrée de visiteurs, et ajoute : “La plupart ne savent pas faire une recherche et ont des comportements inciviques comme déplacer les livres”. Comportements que dénonce Bouchra : “Certaines personnes déplacent sciemment les livres de rayon en rayon pour être les seules à connaître leur emplacement et empêchent les autres de les consulter”. Cet avis est partagé par le directeur adjoint, Abdelati Lahlou qui ajoute qu'il y a un manque de personnel pour gérer la salle. “La salle des chercheurs ouvre plus longtemps (de 8h à 19h !), nous sommes obligés de scinder le personnel en une équipe le matin et une autre l'après-midi”. De surcroît, pour trouver un livre, inutile de compter sur le fichier informatique, une partie des entrées est toujours uniquement consultable dans de vieux tiroirs incommodes.
Dix ans de retard
“Le référencement des livres se fait selon le titre et l'auteur uniquement. La recherche par mots- clés n'a pas encore été mise en place”, explique M. Boukili, un informatiste. D'après la direction, le problème sera résolu avec l'acquisition prochaine d'un logiciel de gestion documentaire qui coûte trois millions de dirhams. “Ce logiciel marquera l'entrée de la bibliothèque dans l'ère du numérique”, lance Driss Khrouz. Un investissement certes colossal mais qui ne résout pas tout. Un responsable pointe du doigt le manque d'expérience et de formation des informatistes. De plus, on ne forme plus de bibliothécaires à L'Ecole des Sciences de l'Information (ESI). Toutefois, le directeur adjoint assure qu'un plan de recrutement et de mise à niveau du personnel est sur les rails. Objectif : renforcer l'effectif qui n'est que de sept informatistes et former des profils plus pointus. Autre point noir, le retard dans le traitement des livres. Pour ceux édités au Maroc, le problème est moindre, l'obligation de dépôt légal assure une copie aux lecteurs, mais pour les livres édités à l'étranger, il y aurait un retard de plus de dix ans ! Driss Khrouz est confiant : “Le conseil administratif m'a donné son feu vert pour confier le marché à une entreprise. Je vous garantis que fin 2006, tous les livres seront traités”, assure-t-il. S'il y parvient, il aura réparé les conséquences de la gestion désastreuse de la bibliothèque pendant les années 80. “C'était la siba (anarchie)”, lance un cadre, dépité.
Journaux en péril
Les dégâts sont plus visibles au service des journaux. “C'est au petit bonheur la chance. On peut trouver ce qu'on cherche comme on peut repartir bredouille”, assure un visiteur. Comme pour les livres, la bibliothèque s'alimente du dépôt légal et des collections privées. Selon Saâd Cherkaoui, le responsable de cette section : “Quand un donateur offre sa collection à la bibliothèque, il fournit non seulement des livres mais également des archives de journaux, malheureusement reléguées au second plan”. Depuis des années, les journaux sont entreposés dans des dépôts en attendant de vérifier “l'état de la collection”, c'est-à-dire les journaux réellement exploitables, ceux qui ne sont pas détériorés ou carrément perdus. Le directeur adjoint explique que c'est un problème d'espace qui sera bientôt réglé quand la bibliothèque déménagera dans les nouveaux locaux de 20 832 m2. “L'emplacement actuel sera dédié en partie aux journaux”, explique Driss Khrouz mais selon un autre responsable, rien ne sera réglé tant que le personnel de la bibliothèque ne sera pas mis à niveau. En attendant, les journaux traînent par terre, se détériorent sous l'effet de l'humidité ou, pis encore, sont volés par le premier venu. Aucun procédé de climatisation n'est en place mais pour Mustapha Kadiri, “les journaux ont juste besoin d'être aérés, leur papier est souvent de mauvaise qualité et se détériore facilement”. Soit, mais entasser par piles les journaux ne contribue-t-il pas à accélérer leur détérioration ? Le directeur adjoint assure que des efforts ont été faits pour leur conservation, en attendant qu'ils soient microfilmés et numérisés. Des boîtes de rangement ont été conçues spécialement pour eux mais ces efforts ne concernent qu'une partie infime de la collection. “Priorité a été donnée aux journaux représentant un patrimoine pour le Maroc ou à ceux que l'on ne retrouverait pas ailleurs”, affirme Saâd Cherkaoui. “2006 est une période transitoire , les réformes vont bon train”, lance le directeur adjoint. Oui, mais les documents tiendront-ils jusque-là ? Un responsable lance, sans ironie : “Ils ont bien tenu 50 ans, quelques années de plus ou de moins…”Malgré l'état désastreux dans lequel se trouvent les livres et les journaux, l'optimisme est de bon aloi à la BN. Et pour cause, le déménagement dans les nouveaux locaux, sis à quelques mètres du site actuel, est prévu pour 2007. Mais est-ce seulement une affaire de murs et d'espace ?
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Microfilm, Késako ?
Le microfilm est probablement ce qui va sauver les archives de journaux. Le procédé est déjà utilisé pour les manuscrits et a fait ses preuves ailleurs. L'avantage du microfilm par rapport au CD, c'est sa durée de conservation qui atteint plus d'une centaine d'années. L'opération est simple : à l'aide d'une machine (photo ci-contre), un technicien photographie sur de la pellicule-photo les pages du document qui est ensuite dupliqué. Une première copie est rangée dans les archives et une seconde est mise à la disposition des lecteurs qui peuvent ainsi visionner le document et, s'ils le désirent, obtenir un tirage papier pour 3,50 DH.
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ZC



8.4.06

Le jus de canne à sucre fait un tabac
(Article publié dans L'economiste du 19/09/2005)
· Une boisson très prisée dans la ville
· Le vendeur vante ses vertus thérapeutiques
A première vue, une crémerie comme une autre avec quelques clients en train de siroter un jus ou de boire du yaourt. Pourtant, le gérant, un Egyptien installé depuis peu à Marrakech, y vend un produit peu commun: du jus de canne à sucre. On l’appelle Saïd l’Egyptien. Il maîtrise très bien la «Darija» et paraît fier de son petit commerce. «Je n’ai pas à me plaindre, des gens de toutes les villes du Royaume viennent déguster ma spécialité». Saïd a même placardé une affiche qui vante les vertus thérapeutiques de son produit: «Produit énergétique, riche en vitamines, nettoie les intestins des impuretés, combat l’asthme et les maladies respiratoires, favorise la dissolution des calculs rénaux, etc.»Il se fait même super VRP pour son produit et prétend qu’il est cité par le prophète comme une plante aux multiples vertus. Mais il tempère ses propos en disant «enfin, c’est ce que les gens racontent». Si l’on peut douter de la véracité de ses propos, on ne peut qu’apprécier le goût légèrement acidulé du jus. Qui plus est un grand verre «d’élixir» ne coûte que 5 dirhams et souvent on n’a droit au précieux breuvage qu’après avoir retiré un ticket numéroté. La grosse machine qui broie la canne est importée d’Egypte. Selon Saïd, le jus de canne à sucre est un produit banal là-bas. «J’ai passé 3 ans à Meknès où je vendais le même produit avant de venir m’installer à Marrakech depuis à peine 2 ans. Al hamdou lillah, le commerce est florissant». Quant à la canne à sucre, il me confie qu’il la négocie aux fellahs locaux aux alentours de 300 à 400 dirhams la tonne. «Vous tombez mal!» s’exclame Saïd, «le gel a détruit une grande partie de la récolte, j’attends toujours un arrivage de cannes qui devrait être là au plus tard dans 10 jours». Lorsqu’on avait un bon stock, des files entières de clients attendaient leur tour. La réaction des consommateurs est un mélange de stupeur et de curiosité. Ils sont impressionnés à la vue du broyeur à canne à sucre. Les gens s’arrêtent souvent pour demander ce que c’est. Quand ils goûtent le jus, ils s’empressent d’en parler autour d’eux. C’est grâce au bouche-à-oreille que Saïd l’Egyptien a pu avoir pignon sur rue, loin de chez lui, au Maroc. En attendant la prochaine récolte, Saïd dispose à la place de la machine un présentoir de chips et une glacière de crème glacée.
ZC
Moi pirate de console...
(Article publié dans l'Economiste du 7/11/2005)
· Des consoles formatées à la lecture de jeux piratés
· Comme pour les décodeurs numériques, les schémas de montage sont copiés d’Internet
Le Maroc à l’instar du reste du monde connaît un engouement pour les jeux vidéo, industrie qui se chiffre à plusieurs milliards de dollars et qui a supplanté les jeux de société. Les consoles de jeux vidéo représentent le plus gros du marché et dépassent en termes de chiffres le jeu vidéo pour ordinateur et pour téléphones portables. La Playstation 2 de Sony est la console qui tient le haut du pavé avec 70 millions d’unités vendues dans le monde jusqu’à aujourd’hui. C’est la console la plus populaire au Maroc, mais aussi la plus facile à pirater. A leur sortie d’usine, les consoles sont configurées de manière à ce qu’elles ne puissent pas lire les copies pirates de jeux. Pour contourner cette protection, une puce est installée dans la console. Les consoles «pucées» n’auront alors aucun mal à lire les jeux piratés. Mais là encore, tout dépend de la puce installée et du modèle de console aussi. Si la puce ne pose pas de problèmes pour les consoles Xbox et Game Cube, en ce qui concerne la Playstation 2, c’est tout autre. Il existe plusieurs marques de puces de qualité inégales et plusieurs versions de Playstation 2, ce qui rend la tâche du poseur de puce très compliquée. Noureddine en connaît un rayon, il installe dans son garage transformé en cyber, sis au quartier Badii à Marrakech, le précieux sésame. «J’ai une affection toute particulière pour la puce Ghost, elle est de bonne facture et personne ne s’en est plaint jusqu’à aujourd’hui». Petit bémol, cette puce n’est compatible qu’avec les dernières générations de Playstation2, la PStwo, plus compacte et ultraplate. «D’ailleurs, on ne vend plus que des PStwo, la PS2 classique n’est plus produite». Pour les versions plus anciennes, la Magic 5 est la puce qui présente le meilleur rapport qualité/prix, mais pour les versions SCPH-50000, elle peut mettre hors circuit la lentille. Noureddine se fait payer 400 dirhams pour installer la Magic 5 et 600 dirhams pour la Ghost. · Un commerce qui ratisse largePour pouvoir installer les puces, les schémas de montage sont copiés d’Internet. «Les pirates marocains ne sont pas tous des surdoués de l’informatique, ils se contentent de copier les schémas d’Internet. Le reste est affaire d’expérience», ajoute-t-il. Noureddine a son réseau, mais la plupart du temps il se déplace en personne à Casablanca pour pouvoir se procurer les puces. Selon lui, les importateurs de puces sont souvent les mêmes que ceux qui importent les CD’s et DVD vierges, ce sont de véritables mafias et ceux qui profitent vraiment du piratage. Ils ramènent des containers entiers de marchandises. Parallèlement à cela, Noureddine vend aussi des consoles, des jeux dont le prix n’excède pas les 20 dirhams et tient une petite salle de jeux. «La Playstation 2 est très nettement la console la plus vendue, elle bénéficie de la réputation de son aînée, la Playstation première du nom, la Game Cube et la Xbox, sont, elles, réservées aux initiés. C’est un peu dommage car avec la Playstation 2, on a beaucoup de problèmes, notamment au niveau du bloc optique». Concernant sa clientèle, Noureddine affirme que c’est surtout les jeunes, âgés de 15 à 25 ans qui viennent acheter jeux et consoles. «Bien sûr, il m’arrive de vendre à des enfants, mais ils sont accompagnés de leurs parents et ne reviennent pas souvent». Mustapha est vendeur à Sailane, un établissement spécialisé dans la vente de matériel électronique. Il assure ne pas vendre de jeux originaux. Normal avec un prix oscillant entre 400 et 600 dirhams, qui irait s’aventurer à faire ce genre de dépenses alors qu’il peut se procurer une copie similaire à 15 dirhams? «Nous avons renoncé à la vente de jeux vidéo. On se limite à offrir un jeu original lors de l’achat de la console pour encourager les clients». Ces derniers, confie Mustapha, sont surtout des enfants qui viennent en famille acheter leur console. Si en Europe le gros des achats se fait pendant Noël en fin d’année, au Maroc, c’est en été où les consoles se vendent le mieux. Les ventes chutent généralement durant la rentrée.Les gens ne sont pas dupes, ils savent qu’en installant une puce dans leur console, ils achèteront tous les jeux qu’ils veulent à prix modique. Il arrive même que les vendeurs orientent directement leurs clients vers l’échoppe d’un vendeur de puces. «Pour notre part, nous prévenons nos clients que la pose de la puce annule la garantie, après ils font ce qu’ils veulent», explique-t-il. Un petit tour dans les magasins spécialisés dans le vidéo ludique est suffisant pour se rendre compte que le piratage à encore de beaux jours devant lui. Il est impensable de parler à l’heure actuelle d’un marché du jeu vidéo, tant l’anarchie caractérise ce secteur. A l’image de la musique et des films piratés, le public marocain sera toujours à la page, mais si une industrie locale devait se développer, ce sera rapidement le Game Over… Pour elle.
ZC
"C'est Al Jazeera qui a crée le Qatar"
(Article publié sur le site de l'ISIC www.isic.ac.ma)
Frank Mermier, anthropologue et auteur du livre « mondialisation et nouveaux médias dans le monde arabe », a répondu à l’invitation de l’Institut Supérieur d’Information et de Communication (ISIC) de Rabat. Il analyse les médias dans le monde arabe et la percée de chaînes comme Al-Jazeera. Compte rendu de la conférence.
Vendredi 19 heures dans le grand amphi de l’Institut Supérieur d’Information et de Communication (ISIC) de Rabat. Frank Mermier surprend l’audience en répondant parfois en arabe avec un accent libanais. Normal, il vit et travaille à Beyrouth.Pour le chercheur, le développement des médias audiovisuels dans le monde arabe, surtout la télévision et Internet, est saisissant. Cela contraste avec le développement de la presse écrite et de l’édition. Il impute cela au retard qu’a pris l’introduction de l’imprimerie dans le monde arabe. Mermier nuance ses propos : le pluralisme politique que connaissent certains régimes –le Yémen et l’Irak post Saddam, par exemple- favorise « l’efflorescence » de titres de presse. Mermier déplore le sous développement de l’édition, d’autant plus que c’est l’un des rares domaines bénéficiant d’autonomie et où l’on peut innover sans craindre la censure. La directrice de l’ISIC, Latifa Akharbach enfonce le clou en avançant un chiffre effarent : dans l’espace arabe qui compte 284 millions d’habitants, les best-sellers ne sont écoulés qu’à 5000 exemplaires en moyenne. Un chiffre qui fait froid dans le dos comparé aux millions d’exemplaires vendus dans les pays occidentaux. Devant le peu de lecteurs et avec l’encouragement de certaines capitales arabes, les chaînes satellitaires se sont multipliées. 200 nouvelles chaînes ont vu le jour dont plusieurs sont spécialisées. Treize sont des chaînes d’information continue. La plus connue est Al-Jazeera.Parole aux minorités« C’est Al-Jazeera qui a crée le Qatar » lance Frank Mermier. « La chaîne qatarie est un instrument de communication intelligente de la part d’un petit pays comme le Qatar », explique Abdellatif Bensfia, enseignant à l’ISIC. Et d’ajouter : « Ce pays a tout compris, il réussi le pari d’exister politiquement face à l’Arabie Saoudite en utilisant une “arme“ moderne : les médias ». Le pays, proche des Etats-Unis a laissé une grande marge de manœuvre à la chaîne. Elle est désormais crédible aux yeux de la population arabe, car elle donne la parole aux minorités et respecte les standards professionnels internationaux. Al-Jazeera a ouvert une brèche, mais les chaînes nationales ne suivent toujours pas. Latifa Akherbach dénonce cet état : « nous avons besoin de télés libres dans tout le monde arabe ». Ce qui impressionne, de l’avis de Frank Mermier, c’est que « ces chaînes ont réduit l’hégémonie occidentale des images télévisuelles ». On voit régulièrement le logo “Al-Jazeera exclusive“ apparaître sur les chaînes les plus prestigieuses, à commencer par CNN. Mais pour les occidentaux, « Al-Jazeera cristallise tous les phantasmes » explique Frank Mermier; elle y est régulièrement accusée de faire de la propagande.TéléréalitéMermier avance l’idée qu’un « nouvel arabisme » fait son chemin. Signe qui ne trompe pas : le nom même de certaines chaînes comme « Al-Arabia » (littéralement « l’Arabe ») ou « Al-Sumaria » (en référence au pays de Sumer et son peuple installé en Mésopotamie -actuel Irak). Ces chaînes sont entrain de créer une culture de masse différente car originale, mais qui cherche à diffuser une culture médiane. Par exemple les émissions de télé réalité libanaises « Star Academy » et « Popstars ». Ce constat oppose ces nouvelles chaînes qui s’adressent à un citoyen consommateur, aux chaînes nationales où le téléspectateur est perçu comme un citoyen à éduquer et à encadrer. La société de consommation à l’américaine se frayerait-elle un chemin dans le monde arabe ? C’est ce que soutien Mermier.
ZC
A l'écoute des femmes violentées
( Article pour le compte du FNUAP (c) )
On a beau chercher dans un dictionnaire, le terme écoutante n’y figure pas. Pourtant, c’est le travail qu’accomplit chaque jour, du lundi au samedi matin, Nadia, à l’association Ennakhil pour la femme et l’enfant à Marrakech. Les locaux exigus de l’ONG accueillent chaque jour une dizaine de femmes victimes de violence. Quatre écoutantes sont chargées du premier contact et du soutien moral de ces femmes.Cela fait 5 ans que Nadia fait ce métier, c’est à dire depuis le commencement du projet. Au départ rien ne prédisposait cette jeune femme à ce métier, elle est licenciée en géologie, mais elle a fait le pari du social, et dit elle même « s’y retrouver ». Des psychologues l’ont formés aux techniques d’écoute. Elle a apprit à observer d’abord et ensuite à mettre en confiance les femmes qu’elle reçoit. C’est pourquoi les premières séances sont consacrées à la présentation de l’association et au réconfort des victimes. Passée cette étape, elle essaie au maximum de poser des questions ouvertes, c’est à dire qui permettent aux femmes de raconter librement leur vécu. La plupart du temps, il faut reformuler le discours des victimes encore sous le choc. Et des victimes, il en arrive de Marrakech et de toute la région environnante. Les femmes connaissent l’association grâce au bouche-à-oreille et parfois à travers la cellule sociale de l’hôpital Ibn Tofaïl où encore la cellule d’écoute de la police judiciaire. Les trois fonctionnent selon le principe des vases communicants, avec une spécificité pour chacun d’entre eux. L’hôpital reçoit systématiquement tous les cas de violence extrême, car nécessitant l’hospitalisation, La PJ reçoit les affaires aux stades avancés et Ennakhil, quant à elle, à une vocation plus sociale, elle accompagne psychologiquement et aide juridiquement les femmes qui l’a sollicitent. La plupart des cas sont des violences conjugales. « Quand le cas n’est pas grave, on essaie de réconcilier la femme et son mari, mais quand c’est plus grave, on oriente directement vers la PJ, si la femme le désire bien sûr» renchérit Nadia. Car les femmes refusent parfois de recourir à la justice, à cause de sa lenteur et pour que leurs enfants ne subissent pas les conséquences de ce genre de procédures. Le travail de l’écoutante s’apparente beaucoup à celui du psychologue. Réconforter les femmes qui arrivent est sa mission première. Certaines d’entre elles ne vont pas plus loin, mais au moins cela leur permet de trouver quelqu’un qui les écoute. «Écouter est très difficile, il faut une attention de tous les instants et beaucoup de patience » explique Nadia. Selon elle, la violence touche tous les milieux et toutes les catégories sociales », de plus, la majorité des femmes ignorent les avancés de la moudouwana. Et ne vous y trompez pas « Même les femmes qui ont fait des études supérieures, parfois même de droit ( !) ignorent la loi ». Mais la moudawana a permit au moins une chose, les femmes s’orientent plus volontiers à Ennakhil car elles savent désormais que quelque chose a changé, et que ce changement est positif. C’est le rôle de l’association de les sensibiliser sur le contenu. « La moudouwana n’est pas tombée du ciel, elle est le fruit du combat des associations féminines de tous le royaume ». Nadia est militante dans l’âme, elle se demande comment elle a pu se marier en ayant en tête ce topo peut reluisant des hommes marocains. Mais elle est confiante, sa famille la soutient à 100%. « Ma mère me dit toujours que tous les hommes ne sont pas pareils et que certaines fois, c’est la femme qui a tort ». « Mais rien n’y fait, je n’arrive pas à le concevoir ! ». Nadia a vu tellement d’atrocités qu’il lui arrive de ne pas dormir la nuit. Pour cela, elle et ses amis écoutantes bénéficient de séances avec des psychologues tous les trois mois, pour « tenir le coup ». « Une femme qui fait l’écoute, c’est comme l’infirmière qui reçoit chaque jour des malades graves ».
Le cas d’une jeune muette violée---------------------------------------
Une histoire a beaucoup marqué Nadia. Elle a tenu à nous la raconter. Les événements remontent à 3 ans et ont étés largement couverts par les journaux et 2M. Une jeune muette de 15 ans est victime d’un viol. Cela s’est passé au Douar Oulad Hassoun, proche de Marrakech. L’agresseur (36 ans) et la fille sont issus du village. Après qu’il ait accomplie son forfait, l’agresseur jette la pauvre fillette dans un puit et lui lance des cailloux. Le choc occasionné par la chute provoque de multiples fractures. L’adolescente est restée 7 jours dans le puit, ses gémissements ont fini par alerter la population. La fillette a été admise à l’hôpital Ibn Tofaïl de Marrakech dans un état critique. Les assistantes sociales ont ensuite alerté l’association Ennakhil qui a dépêché une écoutante sur les lieux. C’est la mère de la fillette qui a pu traduire à l’écoutante les gestes de la fille.
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ZC
Les foyers féminins s'ouvrent à leur environnement
( Article pour le compte du FNUAP (c) )
Quelque chose a changé dans le foyer féminin de Hay Mohamadi de Marrakech. Le centre est désormais équipé d’une salle multimédia connectée à internet, alors que la salle comportait seulement des ordinateurs réservés aux études. Elle ouvrira bientôt ses portes à tous, et pas seulement aux étudiantes du foyer, moyennant un abonnement symbolique. La personne chargée de l’encadrement vient tout juste de prendre ses fonctions. Elle trouve déjà des difficultés à concrétiser le projet. « j’ai décelé du matériel défectueux, j’attends qu’il soit remplacé », s’exclame-t-elle. Mais rien d’insurmontable, le problème se situe autre part, comment concilier les horaires de cours avec les horaires d’ouverture du cyber ? Un problème épineux que la direction n’a pas encore résolut. Mais quoi qu’il en soit, la salle multimédia répond à une attente importante de la population défavorisée de ce quartier : avoir accès aux technologies de l’information et de la communication à un prix raisonnable. La directrice du foyer nous explique que certaines de ses étudiantes n’arrivent même pas à payer la cotisation mensuelle de trente dirhams. C’est dire la précarité et le besoin d’une telle population. D’ailleurs, ils ne cachent pas leur satisfaction, pour eux ce cyber vient à point nommé et leur permettra de pallier l’absence d’une bibliothèque au sein de l’établissement. Mais attention, pas question d’utiliser la salle à des fins autres qu’éducatives. Elle est consacrée exclusivement à la recherche et l’éducatrice y veille. Autre exemple, le foyer féminin du quartier Azli à Marrakech. Ce dernier bourdonne d’activité. Entre les cours, les multiples ateliers (broderie, coiffure, informatique, peinture sur verre et céramique) et les répétitions d’une pièce de théâtre, les étudiantes sont bien occupées. Parmi elles, des « éducatrices pairs », c’est à dire des jeunes filles particulièrement actives et réceptives qui ont étés formées aux techniques d’écoutes et sensibilisées par rapport aux dangers des maladies sexuellement transmissibles. Ces filles sont chargées ensuite de répandre l’information tout autour d’elles. Et elles se sentent réellement investies d’une mission. Dans la salle des activités socioculturelles aménagée avec l’aide du FNUAP, elles peuvent se réunir, organiser des activités et distribuer des dépliants de sensibilisation. Elles sont fières de la pièce de théâtre qu’elles préparent. Elle raconte l’histoire d’une jeune femme victime de violence et qui essaie par tous les moyens de s’en sortir. Une expérience similaire a été tentée au foyer féminin de Hay Mohamadi. Ces étudiantes ont surtout appris à écouter et à donner de l’importance à leurs interlocuteurs. Les filles ont confiance en elles et se confient tout naturellement. Mais elles vont aussi à la rencontre de leurs paires, souvent dans des conditions informelles «la plupart du temps, on se rencontre au hammam ou chez une voisine ». Mounia, une des bénéficiaire, dit que grâce à cette formation, elle s’est débarrassée de ses tabous, elle ose maintenant aborder avec les filles des thèmes comme la prévention des maladies sexuellement transmissibles et elles les orientent vers le centre de santé. Chose surprenante, elles sont même sollicitées parfois par des adultes… des femmes de 30 à 40 ans leurs demandent conseil. Les éducatrices paires sont aussi les premières à bénéficier de cette formation. L’une d’elle avoue même que la formation lui a apprit comment agir dans sa propre vie. Quelques regrets tout de même, le manque de matériel et la rareté des séminaires de formation.
ZC
"Très" sages femmes
(Article pour le compte du FNUAP (c) )
C’est l’histoire de jeunes citadines qui ont choisi de travailler à la campagne. Leur profession : sages femmes. Leur mission : sauver des vies. Nous avons rencontré l’une d’elles. Sofia nous parle de la difficulté de son métier, mais aussi de la joie de donner la vie.
Un peu timide, voilée mais communicative et enjoué, Sofia Tamalout exerce le métier de sage femme au centre de santé de Sahrij. Elle est là depuis deux ans. Elle partage cette responsabilité avec une autre sage femme et une infirmière polyvalente venue dernièrement. Sofia nous confie, non sans fierté, avoir aidé près de 300 femmes à accoucher. Un métier difficile selon elle, qui exige une grande disponibilité et un sens aigu de la communication. D’ailleurs son travail ne lui laisse aucun répit, durant les semaines de garde, elle est obligée d’être à la disponibilité du centre 24h/24.Accoucheuse en sérieElle nous raconte son premier jour dans le centre de santé : «la première chose qui m’effrayait, c’était l’énorme responsabilité dont je suis investie. Je n’étais plus étudiante, mes actes avaient des conséquences directes sur les patientes, l’erreur n’était plus tolérable ». D’ailleurs, dès son arrivée, elle a du faire un premier accouchement. «Heureusement, tout s’était bien passé. J’étais soulagée et contente d’y être parvenue seule ». Sofia avoue être chanceuse à plus d’un niveau, elle est soutenue par toute l’équipe, et surtout par le major de la circonscription, Miloudi Hamdouchi. Selon elle, c’est grâce à la grande souplesse de travail qu’elle et ses collègues arrivent à accomplir leur mission. Un exemple pour illustrer ces propos. Le jour même de notre visite, la seconde sage femme du centre était absente à cause du décès de son père. Selon la loi, elle n’a droit qu’a 3 jours de congé, mais le major va lui en octroyer plus. Miloudi nous explique pourquoi : «Notre objectif, c’est que le travail soit accomplie correctement, or cette jeune femme ne pourra jamais supporter la pression car elle est encore sous le choc. Il est hors de question de la faire travailler au risque de mettre en danger la vie des femmes enceintes ». Sofia bénéficie aussi d’un autre avantage. L’endroit dans lequel elle travaille est plutôt accessible par les transports, ce qui n’est pas le cas de tous les centres ou travaillent les sages femmes. L’une de ses amies, par exemple, travaille dans un douar. A chaque fois qu’elle désire ce rendre chez ses parents à Marrakech, c’est l’expédition. Elle doit traverser plusieurs kilomètres de piste avant de trouver un taxi qui veuille bien l’emmener.Une intégration difficileSofia a réussi à s’intégrer en campagne, mais ça n’a pas toujours été le cas. La première difficulté à laquelle elle a du faire face, c’est les divergences de mentalités. «Le taux d’analphabétisme est très élevé ici. Même si en ville il y a des femmes analphabètes, leur environnement les aide à prendre conscience de beaucoup de choses » dit avec dépit Sofia. Les femmes rurales ont aussi des réflexes différents des citadines, elles ne s’adressent au centre d’accouchement que quand leur grossesse présente des complications. « En compagne, les femmes sont très récalcitrantes aux conseils médicaux. Il arrive que les conseils que je leur donne ne soient pas pris en compte à cause d’une femme du village qui leur a dit le contraire » renchérit Sofia. Mais la confiance se gagne, et les femmes finissent par lui accorder la leur. La preuve, le taux de femmes qui ont recours au centre augmente. «Au début, elles n’étaient qu’une vingtaine à arriver chaque mois, maintenant, leur nombre dépasse les 40» explique Sofia, registre du centre à l’appui. Mais cela pose un autre problème, le nombre réduit du personnel et le matériel insuffisant. En effet, les deux sages femmes, l’infirmière et la seule ambulance qui équipe la circonscription paraissent bien chétifs comparés au nombre de patientes qui attendent dans les deux salles d’attente. De plus, le matériel disponible est loin de répondre aux attentes de la population. «On ne possède pas le matériel pour la réanimation des nouveaux nés, pas de table chauffante non plus ni de ventouse ou de bouteille d’oxygène» avoue Sofia. Elle essaie donc de repérer au maximum les complications avant l’accouchement. Pour l’instant, ses efforts ont l’air de porter ses fruits, aucun décès maternel n’a été enregistré depuis la création du centre.
ZC
Un espace pour parler de la santé des jeunes
(Article pour le compte du FNUAP(c) )

« Il existe deux sortes d’accueil : l’accueil chaleureux et l’accueil… malheureux. Nous, nous préférons le premier ». C’est Abderrahman Qrich, animateur à l’espace santé des jeunes de Marrakech qui s’exprime ainsi. La réalité est pour une fois conforme aux promesses. L’Espace Santé des Jeunes, ESJ pour les intimes, est un endroit convivial, doté d’ordinateurs connectés à Internet, d’une salle de consultation équipée et d’une salle pour écouter les problèmes des jeunes. Il ressemble plus à un mini centre culturel qu’à un centre de santé. Quand on y entre, on trouve un petit comptoir d’accueil, et une salle d’attente dans laquelle on a installé une télévision, un lecteur DVD et une chaîne Hi-Fi. Juste à côté, le centre névralgique de l’ESJ, la salle polyvalente dans laquelle un comité constitué de jeunes particulièrement motivés se réunissent deux fois par semaine pour organiser des activités. Farés est l’un d’entre eux, il dit avoir connu l’espace santé par hasard. «Je passais par le quartier et j’ai découvert par hasard l’existence du centre. M. Abderrahman m’avait gentiment accueillit, je lui ai posé une question toute bête “Espace santé des jeunes, c’est quoi“ Il m’a alors présenté au docteur Zahir qui m’a expliqué que l’espace santé des jeunes n’est pas un dispensaire, mais un endroit ou on peut parler de nos problèmes en toute intimité, s’informer et consulter gratuitement. Depuis ce jour, il m’arrive de venir au centre sans raisons particulières ». Le comité de bénévoles dans lequel travaille Farés à de grandes ambitions : créer un site web et élaborer des affiches sur l’activité de l’ESJ, mettre en place une caravane itinérante pour pallier l’inexistence d’autres espaces santé à Marrakech… La salle polyvalente est aussi équipée d’ordinateurs branchés sur Internet. Les jeunes peuvent utiliser les PC sans restrictions. « Seule condition, que ce soit uniquement pour des recherches dans le domaine de la santé » explique le Dr. Zahir. Lamia est lycéenne, elle utilise chaque fois qu’elle en a besoin l’ordinateur de l’espace santé «Je cherche des informations sur le Sida pour un exposé, je viens à l’espace santé pour faire des recherches sur Internet». Lamia a connu l’ESJ grâce à une de ses amies, elle est satisfaite des services du centre. « C’est différent de l’hôpital, ici on nous laisse tranquilles, on ne nous dit pas qui êtes vous ou que venez-vous faire ici. On se sent libres. En plus, le personnel est souriant».A l’espace santé, on a aussi aménagé une salle pour l’écoute des jeunes en difficulté. Le Dr Zahir avoue que la plupart des jeunes viennent pour cela. «Un jour, on a reçu la visite d’un adolescent de 13 ans atteint d’un rhumatisme articulaire aigu (RAA). Malgré son état grave, il refusait de prendre ses médicaments. Pour pouvoir lui administrer son injection d’extanciline, il a fallut que six personnes le maîtrisent. On a fait avec lui plusieurs séances d’écoute, et maintenant, il vient seul, tout les vingt jours, pour faire son injection». Sur ce qui les motivent pour faire ce travail, l’équipe est unanime, «Nous considérons les jeunes qui nous visitent comme nos propres enfants».
Z.C.
Ceux qui feront 2030
(Simple synthèse d'une enquête L'Economiste/Sunergia)
Les jeunes, qui sont-ils, comment vivent-ils, que pensent-ils. Réponse dans cette synthèse de la série d’articles publiés dans L'Economiste à la suite d'une enquête sur le terrain effectuée par le cabinet Sunergia. Bonne lecture
Le quotidien L’Economiste a mené une enquête de grande envergure conduite par le cabinet d’études Sunergia en l’automne 2005. Elle a concerné un échantillon de jeune de 16 à 29 ans : 390 garçons et 386 filles. La méthode utilisée est celle des quotas : un échantillon représentatif des jeunes marocains sur la base du dernier recensement du Haut Commissariat au plan.La répartition géographique, les CSP (catégories socioprofessionnelles), le sexe, l’age et la zone d’habitation ont été pris en compte.L’enquête confirme une grande partie des à priori sur les jeunes, mais elles apporte des indices chiffrés et crédibles.Sexe : hypocrisie et je-m’en-foutisme(C.F. L’Economiste du 18 Janvier 2006)67% des garçons affirment avoir déjà eu des expériences sexuelles tandis que 66% des filles jurent le contraire. Conclusion de l’Economiste : les filles se cachent et les garçons se vantent. Plus loin on découvre qu’un tiers des garçons affirme avoir eu sa première relation sexuelle avec sa copine, mais un autre tiers dit l’avoir eu avec une… prostituée. Les choses paraissent plus claires. Notons que seuls 24% des filles disent avoir couché avec leurs copains.L’hypocrisie et le manque d’expérience sexuelle se traduit par des comportements à risque, la non utilisation des moyens de contraception (seulement 36% des filles y ont recours). Aucun jeune ne cite le danger d’attraper une maladie sexuelle, pis encore certains croient que le cancer est une MST ! Un homme sur trois se soucie d’éviter une grossesse et une femme sur trois s’inquiète d’attraper une MST. Le risque de laisser-aller s’accroît en compagne et dans les classes sociales les plus défavorisées. AlarmantAmour : « real lovers »(C.F. L’Economiste du Mercredi 18 Janvier 2006)54% de garçons ont une copine/45% des filles ont un copain. 64% des filles contre 50% des garçons pensent qu’il est compliqué de vivre une relation amoureuse. Plus on est pauvre plus on a tendance à le croire. Pour les filles, le principal obstacle, c’est les parents et l’entourage familiale, suivi des qu’on dira t’on (23%) puis des coutumes et traditions (23% aussi). Autre son de cloche chez les garçons ou c’est surtout le manque d’argent le principal obstacle (40%), suivi de l’entourage et de la famille .Dans le même ordre d’idées, 34% des garçons pensent que réussir équivaut à avoir beaucoup d’argent (26% des filles). La proportion est plus importante chez les 25-29 ans (1 jeune sur 4). Le taux de réponse sur les risques de contracter une MST, d’avoir une grossesse ou la perte de la virginité est marginal (cette dernière donne a été analysée par l’hebdomadaire TelQuel comme une révolution dans les mœurs). Détail notable : les jeunes ne pensent pas que la religion soit une entrave à leur émois)Argent : Matérialistes mais « mardiyiines »(C.F. L’Economiste du 20 Janvier 2006)92% des garçons et 88% des filles affirment vivre avec leurs parents et prennent au moins un repas à la maison parentale. Seulement 29% des 25-29 ans sont indépendants. Ces chiffres sont proches quelle que soit la CSP, au rural comme à l’urbain.56% des jeunes de 16 à 29 ans sont dépendants financièrement de leurs parents. Le taux est plus élevé chez les filles (65%) que chez les garçons (46%). Plus grave, seul 29% des 25-29 ans se disent indépendants.Chose surprenante : 59% des 16-17 ans disent aider leurs parents, alors qu’ils dépendent d’eux à 86% ! Kafkaïen ? Non, si on considère que la solidarité fonctionne dans les deux sens. Plus on est riche, moins on est débrouillard (70% des CSP A et B sont dépendants financièrement de leurs parents)Religion : de beaux jours pour l’intégrisme(C.F. L’Economiste du 24, 25 Janvier 2006)44% des jeunes pensent qu’Al Qaïda n’est pas une organisation terroriste. 38% ne savent quoi répondre. Les hommes sont plus radicaux que les femmes (50% contre 37%). Seulement 19% des jeunes hommes pensent qu’Al Qaïda est une organisation terroriste.Il semblerait que la politique américaine soit mise en cause. 76% des jeunes pensent que l’intervention en Irak est « inutile et négative ». Les jeunes voient donc en Al Qaïda une alternative aux américains, « un contre-pouvoir » selon l’expression de L’Economiste.Autre aspect du rigorisme montant : le voile. Une grande partie (49%) des jeunes sondés préfèreraient que leur femme soit voilée. 57% des jeunes âgés de 16 à 29 ans sont favorables au port du voile. Les « Hijab addicts » se recrutent le plus parmi les classes les plus défavorisées : 56% des CSP C et B contre 61% de la classe D. Selon l’avis du sociologue Jamal Khalil, publié dans un article de TelQuel du 28 janvier au 3 février : « Ces jeunes se sentiraient plus en confiance avec des femmes voilées. Il auront ainsi la garantie de quelque chose, que ces filles n’ont pas eu de relations sexuelles avant la mariage ». A propos du mariage, l’enquête révèle que 87% des hommes et 58% des femmes préfèreraient épouser une musulmane. Mais pour 67% des hommes, épouser une non marocaine ne pose pas de réel problème. Ça se corse si elle est non musulmane, car seulement 73% convoleraient en noces avec elle. Explications du sociologue Jamal Khalil : « Pour se donner bonne conscience, un passage protocolaire chez las adouls ne fait aucun mal »Moudouwana oblige, 79% des jeunes sont contre la polygamie, surtout les filles (88%). Mais sachez que 30% des jeunes hommes ne disent pas non à un ménage à plusieurs.Seuls ombre au tableau pour les ayatollahs qui voudraient endoctriner les jeunes, 78% des hommes croient en les jnouns (esprits) contre 54% des filles. Dans le même ordre d’idées, 67% des hommes croient au Shours (gris-gris) contre 52%¨des filles. Conclusion : les hommes sont plus superstitieux que les femmes.Plus on prend de l’âge et plus on est crédule à ce genre de choses. 74% des jeunes, soit 1 sur 4 âgés de 25 à 29 y croient et ceci toutes classes sociales confondues.Politique : La déshérence(C.F. L’Economiste du 27 janvier 2006)95% des jeunes ne s’identifient à aucune tendance politique. Pas même au Parti de la Justice et de Développement (P.J.D.). 68% disent « ne pas avoir confiance en la politique ».73% des jeunes pensent que nos parlementaires nous représentent mal. Les classes aisées sont plus sévères que les plus défavorisées 76% (A et B) contre 67% (D). Plus on est âgé, plus ce jugement est sévère.Résultat de la montée de l’intégrisme (voir plus haut), 32% des jeunes pensent que la religion doit guider les partis politiques. 37% pensent le contraire et 31% ne se décident pas. Selon l’analyse de L’Economiste, la partie de l’échantillon qui ne se prononce pas représentera la part à convaincre durant les prochaines batailles électorales.L’enquête Sunergia-L’Economiste a suscité pas mal de réactions de la part de la presse. L’AFP s’est intéressée aux relations sexuelles des jeunes et ce qu’ils pensent d’Al Qaïda. Le Journal islamiste proche du PJD Attajdid a carrément généralisé la préférence du port du voile à tous les marocains. Al Bayane, organe du Parti du Progrès et du socialisme (PPS) tire la sonnette d’alarme quant à la disponibilité des jeunes à être enrôlés par les « djihadistes » du Maroc. TelQuel, newsmag indépendant, a lui titré : « nos jeunes sont inquiétants »
ZC